Après être passé de 4,78 euros le 1er mars, son plus-haut sur un an, à 3,10 euros le 4 juin, perdant ainsi 35% en trois mois, le titre a complètement chuté, mardi 5 juin, plongeant de plus de 61% en séance.
Vous ai-je déjà dit que les biotechs, c’était risqué ? Eh bien vous en avez la preuve.
Alors, NEOVACS (FR0004032746), c’est foutu ? On jette le bébé avec l’eau du bain et on oublie ?
Minute, minute… j’ai bien lu les communiqués, je me suis repenché sur les recherches de NEOVACS et… cela ne m’affole pas.
• Tout d’abord, un bref rappel des recherches de NEOVACS
Cette société de biotechnologie française met au point une forme révolutionnaire de biothérapie pour les maladies auto-immunes (lupus, polyarthrite rhumatoïde, maladie de Crohn…). Il s’agit de traiter les malades différemment. Actuellement les malades peuvent bénéficier, dans les formes les plus avancées de ces pathologies, d’une injection régulière d’anticorps ultra-spécifiques dont l’efficacité, la tolérance et le coût de production posent problème. Le marché de ce type d’anticorps, comme l’anti-TNF alpha, s’est élevé pour la seule année 2010 à 20 milliards de dollars dans le monde.
La technologie Kinoïde développée par NEOVACS tend à remplacer ces injections par l’administration d’un vaccin qui ferait produire au patient lui même ses propres auto-anticorps. Les quatre objectifs clés recherchés par l’entreprise sont :
- une efficacité renforcée par la génération d’anticorps multiples comparés aux anticorps uniques actuellement injectés ;
- une meilleure tolérance ;
- une plus grande simplicité d’utilisation en supprimant les injections bimensuelles ;
- et donc une économie dans la fabrication des anticorps qui ne serait plus dépendante d’une production en laboratoire mais de la simple réponse du patient au vaccin.
Comme dans toute société de biotechnologie n’ayant pas de molécule en commercialisation, l’investissement, purement spéculatif, consiste à dire que la technologie Kinoïde peut séduire de grands groupes pharmaceutiques voulant se positionner sur le juteux marché des anticorps monoclonaux, et qui guettent donc d’un oeil attentif les résultats des études de Phase II en cours. C’est en tout cas le pari que nous avions fait lorsque j’ai recommandé NEOVACS dans mon dossier.
Rappelons que NEOVACS possède suffisamment de capitaux pour tenir ses essais jusqu’à la fin 2012. Le souci, c’est qu’elle ne possède pas les fonds nécessaires à la conduite d’une étude de Phase III. Pour ce faire, elle doit nouer des partenariats avec de grands groupes pharmaceutiques, qui seuls sont à même de financer les études coûteuses de Phase III ouvrant la voie à la commercialisation.
Bon, ça c’est la base. Mais c’est justement dans le compte-rendu des études de Phase II qu’il y a eu un souci.
• Comment expliquer la dégringolade du 5 juin ?
Les investisseurs ont été échaudés par l’annonce d’une non-réponse à la technologie Kinoïde chez les patients de l’étude de Phase IIa – testant les Kinoïdes anti-TNF alpha dans la maladie de Crohn – qui présentaient des taux résiduels d’anticorps monoclonaux.
Pourquoi est-ce inquiétant ? Parce que NEOVACS souhaite justement se positionner sur le créneau des patients résistant aux anticorps monoclonaux classiques et que cette catégorie de patients aurait été une cible idéale pour une nouvelle classe thérapeutique. Or, ce type de patients a logiquement des anticorps monoclonaux à des taux résiduels significatifs présents dans le sang pendant une longue durée après la dernière injection classique. Malgré le soin apporté par NEOVACS dans le délai d’inclusion, justement sur ce type de patients, il semblerait qu’un nombre important d’entre eux présentaient des anticorps anti-TNF alpha bien après la dernière injection. Or, ceux-là n’ont pas réagi au traitement de NOEVACS car les anticorps annulent l’action du TNF-Kinoïde.
Mais, de nombreux éléments positifs ne sont pas pris en compte dans l’annonce des résultats de phase IIa. Tout d’abord, l’objectif initial de ce type d’études consiste à évaluer l’efficacité et la tolérance de la technologie Kinoïde. Et cet objectif est largement atteint. A la dose de 180 mcg, le TNF-Kinoïde entraîne la production d’anticorps (chez les patients n’ayant pas d’anticorps monoclonaux résiduels) et une réponse clinique satisfaisante est corrélée au taux d’anticorps produit. Voilà pour l’efficacité.
Pour ce qui est de la tolérance, aucun problème n’a été soulevé, bien que le nombre de patients de l’étude soit réduit (60). Donc la technologie Kinoïde est valable, à l’exclusion des patients ayant encore dans le sang des anticorps monoclonaux anti-TNF résiduels.
• Je ne m’inquiète pas outre mesure
Le deuxième point important à souligner est purement financier : lors de son introduction en avril 2010, 2 084 636 titres, représentant 16,2% du capital ont été émis au prix de 4,60 euros par action, permettant de lever 10 0006 252,8 euros de capital.
Lors de la déconfiture du 5 juin 2012, 1 362 269 titres ont été échangés, soit moins de 10% du capital de l’entreprise. Les investisseurs institutionnels assurent leur soutient (Truffle Capital : 40% ; Novartis Venture Fund : 26% ; OTC Asset Management : 10%) et sont une garantie de financement des études jusqu’ à la fin 2012.
La prochaine étape permettra certainement de montrer qu’après une période de « lavage » et une fois les anticorps monoclonaux anti-TNF résiduels éliminés, la réponse à la technologie Kinoïde est prometteuse. C’est pourquoi les patients ayant reçu les trois doses de Kinoïde recevront une quatrième dose et ceux ayant reçu le placebo recevront trois doses de Kinoïde. Ces patients sont inclus depuis suffisamment de temps dans l’étude pour assurer un « lavage » des anticorps résiduels. Ces résultats seront disponibles d’ici la fin 2012.
Pour résumer, il y a certes une déception quant à la mauvaise réponse au Kinoïde anti-TNF alpha chez la catégorie de patients ayant une présence résiduelle d’anticorps monoclonaux anti-TNF. Ceux-ci annulent l’action du TNF-Kinoïde. Mais, chez les autres patients, la réponse obtenue est efficace et bien tolérée. La technologie Kinoïde n’est donc pas remise en question mais elle devra s’adapter à ce problème d’anticorps résiduels.
Pour moi, NEOVACS est toujours une société prometteuse qui repose sur une technologie innovante et très certainement efficace. En mettant ainsi en évidence les difficultés financières que rencontre la société pour achever ses études cliniques, cet exemple vous montre, une nouvelle fois, que les biotechs ne sont pas de tout repos.
Les indications de la technologie Kinoïde seront peut-être à revoir et ne pourront peut-être pas être retenues en cas de traitement antérieurs par des anticorps monoclonaux anti-TNF alpha.
Tant que les investisseurs institutionnels restent en place, il n’y a pas de risque majeur. Mais il est urgent qu’un partenariat soit signé et les résultats de la prochaine étude, pour fin 2012 seront décisifs : action statistiquement significative de la technologie Kinoïde chez les patients n’ayant pas de taux résiduels d’anticorps monoclonaux ou non.
Pour séduire un grand groupe il faut proposer un produit abouti et, pour l’instant, NEOVACS promet beaucoup mais ne prouve pas encore définitivement son potentiel.
[Ndlr : si vous voulez avoir le détail scientifique et l’analyse financière complète de NEOVACS, Elias Roth a rédigé un dossier complet sur 5 biotechs, françaises, ultra-prometteuses et que vous pouvez intégrer dans votre PEA. Pour savoir quelles étapes surveiller sur NEOVACS et pour connaître les 4 autres pépites, c’est par ici.]
5 commentaires
[…] Seul vaccin ciblant le TNF (facteur de nécrose tumorale, tumor necrosis factor en anglais) en développement actuellement, le TNF-Kinoïde affiche déjà des résultats encourageants. En janvier 2012, par exemple, l’étude de Phase II du TNF-Kinoïde dans la polyarthrite rhumatoïde a démontré l’efficacité et la bonne tolérance du produit sur les patients. Pour la maladie de Crohn, les résultats intermédiaires de l’essai clinique de Phase II présentés en juin dernier sont un peu plus mitigés – d’où la sévère dégringolade boursière du 5 juin dernier. […]
[…] Ce qui aurait pour conséquence d’être très bien accueilli par les investisseurs, après la déconvenue du mois de juin (après quoi, certains courtiers ont compté le programme dans Crohn pour […]
[…] tout, il s’agit de tester la même cytokine (le TNFα) dans différentes indications. Il est donc légitime de se poser la question sur l’impact d’un éventuel échec sur […]
[…] de quoi rassurer les investisseurs échaudés par les résultats intermédiaires de l’essai clinique de Phase II présentés en juin dernier. Ces derniers avaient notamment permis d’identifier un foyer de non-réponse au Kinoïde. Si […]
[…] de la déception du résultat dans la maladie de Crohn fin mai 2012 (cf. mon précédent article : comment réagir après le massacre de NEOVACS) et flirte avec ses plus-bas. Dans le même temps, la confiance des investisseurs est toujours là, […]