Le marché boursier a connu l’un de ses plus grands retournements intraday depuis longtemps, mercredi dernier (5 avril). Les indices ont monté le matin… puis se sont retournés d’un seul coup, abandonnant leurs gains et finissant la journée dans le rouge.
La raison, bien sûr, a été la publication à 14h00 du compte-rendu de la réunion du FOMC de la Fed du 15 mars. Ce compte-rendu a dévoilé un plan visant à réduire la taille du bilan de la Fed avant la fin de l’année 2017, ce que les marchés n’attendaient pas avant 2018 ou même plus tard.
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La réduction de la taille du bilan est une forme de resserrement monétaire, tout comme une hausse de taux. Les hausses de taux affectent la partie à court terme de la courbe de rendement (et affectent indirectement la partie moyen terme), tandis que la réduction du bilan affecte directement la partie moyen terme de cette courbe. Cela s’apparente donc à un passage à des taux plus élevés d’une manière générale.
Etant donné que les actions sont en concurrence avec les obligations pour les investisseurs, des taux d’intérêt plus élevés sur les obligations – donc un meilleur rendement – signifient théoriquement une baisse des marchés actions. Mais cette fois, le marché a été pris à contre-pied : les intentions de la Fed contredisent le scénario du « tout va pour le mieux » que le marché boursier s’est construit depuis novembre.
Rien de tout cela n’est une surprise si vous nous lisez depuis un moment. Nous avons expliqué, en décembre dernier, que la Fed augmenterait ses taux en mars – à ce moment, le marché ne pricait qu’à 30% cette action pour mars.
Nous disons maintenant que la Fed augmentera ses taux en juin, même si le marché ne le perçoit pas encore. En fait, nous pensons que la Fed augmentera les taux quatre fois par an (en mars, juin, septembre et décembre) jusqu’en 2019, à moins que nous ne voyions un ralentissement extrême de la création d’emplois, une panique du marché boursier, ou de la désinflation. En l’absence de l’une de ces trois conditions, la Fed s’est donnée pour mission d’augmenter les taux.
Réduire la taille de son bilan fait juste partie intégrante de la mission que s’est donnée désormais la Fed de normaliser les taux et son bilan après l’expérimentation un peu folle de Bernanke (politique de taux d’intérêt zéro pendant trop longtemps et QE de 2009 à 2013). Bernanke est passé à côté d’un cycle entier de normalisation en 2010 et 2011. Et maintenant, la Fed essaie de rattraper la bêtise de Bernanke. La Fed doit augmenter les taux avant la prochaine récession pour avoir une marge de manoeuvre et pouvoir les baisser.
La raison pour laquelle le marché est continuellement surpris, c’est parce qu’il associe des taux plus élevés à une économie plus forte. Le marché suppose que si la Fed augmente les taux, c’est que l’économie est forte. C’est généralement vrai… mais ce pas cette fois en raison de ce scénario de rattrapage. La Fed augmente les taux dans une économie faible. C’est quelque chose que nous n’avons pas vu depuis les années 1930, lorsque la Fed a prolongé la Grande Dépression. Lorsque la Fed resserre les conditions monétaires, les marchés se disent que la croissance va être forte… et ils sont déçus si ce n’est pas le cas. Lorsque le Fed fait une pause, les marchés passent en mode risk-on et sont de nouveau déçus lorsque la Fed retourne à une politique moins accommodante. Cette confusion actuelle est le prix que nous avons à payer pour toutes pour les manipulations précédentes de Bernanke.
C’est un jeu dangereux car la Fed peut finir par provoquer la récession qu’elle se prépare à guérir. Et puis, Janet Yellen est sur le départ (prévu en janvier prochain) et va peut-être partir plus tôt si Trump nomme un « président en attente » en la personne de Kevin Warsh, ce qui mettra Yellen sur la touche instantanément. Une récession induite par Yellen pourrait être le beau cadeau de départ qu’elle fera à Donald Trump.
Attachez donc vos ceintures. Le rally boursier actuel pourrait s’inverser rapidement lorsque le resserrement de la Fed commencera à faire sentir ses effets.