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Les banques centrales passent à l’orange, mais jamais au rouge

By 10 mai 2021janvier 23rd, 2023One Comment

Une série de signaux devraient nous alerter sur les niveaux des marchés, mais que faire lorsque les banques centrales continuent de les porter à bout de bras ?  Notre expert Philippe Béchade liste les éléments que tout investisseur devrait désormais prendre en compte…

 

Amorcé le 30 octobre dernier, de nombreux signaux faibles pourraient étayer l’hypothèse d’une défaillance du rally haussier. Mais depuis, ces phénomènes singuliers ont trouvé leur matérialisation le 4 avril. En d’autres circonstances, ne pas y prêter attention serait faire preuve d’une légèreté coupable… Or, dans la situation actuelle, avec un soutien monétaire et verbal sans faille des banques centrales, ces 42 signaux « d’alertes » empilés en quelques semaines ne font frissonner personne. Pas même les permabulls.

Néanmoins, il est difficile de hiérarchiser les éléments techniques qui nous ont alertés et on sait que la plupart relève du domaine du comportement.

A cela s’ajoute l’enthousiasme des investisseurs américains, qui ont déversé 500 Mds$ sur les comptes-titre de la mi-novembre jusqu’à la fin du premier trimestre 2021. Jamais dans l’Histoire ils n’avaient placé autant d’argent – 41% de leurs économies en moyenne – en si peu de temps. Vous le savez comme moi, cela masque d’énormes disparités, mais laissez-moi vous lister les signaux d’alertes les plus importants :

1- La gestion discrétionnaire n’a pas été un modèle pérenne.

Les « particuliers » – que les financiers baptisent le « retail » – étaient devenus l’espace de quelques semaines une force qui compte, des acteurs du quotidien influents, avec un niveau record de 28% en pourcentage du volume total du marché boursier américain en décembre dernier.

Malgré tout, cette part est retombée à 24% en janvier – puis 25% en février (rappelant les niveaux de juin 2020) – avant chuter à 18% en mars… Cette baisse est toutefois à relativiser puisque les taux restent supérieurs aux niveaux pré-pandémie (2018-2019) où l’intéressement du retail n’était que de 12% environ.

De même, les positions « full bull », via des calls, avaient triplé en 2020 avant de culminer fin janvier 2021. Notons qu’à cette occasion, nous avions atteint un record absolu en termes d’encours notionnels. Depuis, ces positions ont reflué sous les 30%, retrouvant des niveaux comparables à ceux de juin 2020.

2- Les choix d’investissements des particuliers ont pris deux directions diamétralement opposées.

Ce n’est pas une grande surprise : lors du confinement généralisé, les investissements des particuliers se sont d’abord portés sur la « stay at home economy ». En effet, outre le télétravail poussé au niveau mondial, il fallait bien se divertir : les logiciels, jeux vidéo et autres applications de streaming ont explosé (Amazon, Peloton, Netflix, Zoom ou encore Microsoft), tout comme la publicité en ligne (Google et Facebook).

Sans oublier tous les acteurs du cloud, des fabricants de semi-conducteurs à la gestion de la data en passant par les spécialistes de stockage et des réseaux.

Mais aussi, et surtout, l’univers des « cryptos », avec Microstrategy, Quantum, Nvidia et plus encore Tesla qui ont lié son destin à celui du bitcoin, dont l’attrait spéculatif s’est renforcé en début d’année. Sa popularité auprès des jeunes n’est plus à démontrer, mais avec la pandémie, le chômage partiel – ou cours à distance – et les chèques fédéraux (côté américain), tout a convergé pour leur offrir du temps libre et des ressources pour trader.

En outre, de nouvelles applications de plus en plus conviviales et quasi-gratuites, ajoutées à l’appui stratégique et à l’essor de communautés – quasi-fanatisées – engendrent des spirales haussières auto-réalisatrices… complètement déconnectées des réalités.

3- Le scénario en « K » s’est radicalisé.

L’une des principales raisons du premier plafonnement du Nasdaq le 16 février semble avoir résulté d’un nouveau phénomène d’évolution des marchés en « K ». Concrètement, les particuliers les plus avertis se sont tournés vers des ETF indiciels passifs plutôt que vers des titres affichant des PER devenus stratosphériques, ce alors que les investisseurs les plus néophytes s’ennuyaient presque avec des titres ne gagnant que 30 à 40% en 3 mois (souvent beaucoup moins).

Pour de nombreuses « cryptos » (souvent confidentielles ou inconnues mais devenant du jour au lendemain des stars de l’algo-trading), c’était du 30 à 40% par semaine, et pour certaines… par jour !

4- Le consensus le mieux partagé devient rapidement le moins pertinent.

Une des grosses thématiques du début d’année est la pénurie de semi-conducteurs, en grande partie causée par la virtualisation de l’économie et la demande frénétique de puces qui équipent les smartphones « 5G ».

Tous les investisseurs se sont rués sur les champions du secteur sensés profiter de la situation pour accroître leurs marges. De leur côté, les constructeurs automobiles sont contraints de payer jusqu’à 30% de plus pour se faire livrer les microcontrôleurs indispensables pour les véhicules électriques. C’était vraiment l’un des consensus haussiers les mieux partagés.

Cependant, depuis le 8 avril, l’indice « SOXX » (ou PHLX Semiconductor) ne progresse plus et enchaîne même les semaines de consolidation. C’est finalement Intel qui a marqué la bascule du secteur des semi-conducteurs, avec 4 semaines de repli d’affilée pour un pullback de 8% sous ses sommets historiques.

5- Les « technos » ont encore pu faire illusion jusqu’à fin avril grâce aux trimestriels, mais les « vraies attentes » étaient largement « pricées ». 

Etant donné le poids des valeurs composant le « Philadelphia SOXX », le Nasdaq n’a pas tardé à plafonner. Il aura fallu la publication de trimestriels canons émanant des GAFAM pour que le Nasdaq et le S&P500 parviennent à inscrire un ultime record absolu vers 14 212 points le 29 avril (dès l’ouverture). Lequel fut suivi d’un gap à la baisse dès le lendemain (vers 13 970 points à l’ouverture).

Même les profits et les ventes records d’Apple – tellement au-delà des attentes les plus exubérantes – n’ont pas réussi à propulser le titre du géant de Cupertino vers de nouveau sommets. Un tel miracle risque en effet de ne pas se reproduire d’ici fin 2021.

6- Les banques centrales ne lâcheront rien : un repli des marchés est interdit.

Ainsi, le Nasdaq ébauche peut-être un « M » baissier sous les 14 150/14 170 points (double fixing d’ouverture des 16 février et 27 avril).

Le palier des 13 700 points a été brièvement compromis le 5 mai, puis sauvé dès le lendemain. L’indice s’est reconstitué une marge de sécurité confortable de plus de 1 150 points par rapport au palier des 12 600… et l’autre consensus parmi les mieux partagés, c’est que les banques centrales ne vont rien lâcher côté « QE » et asséner sans relâche leur scénario d’une « inflation transitoire et maîtrisée » (à chaque fois qu’un chiffre viendra confirmer la dérive des prix).

Dans ces conditions, le risque d’une consolidation de 5% est faible et serait même jugé salutaire. Dans la même optique, le risque de correction de 8% est carrément infime. Si les « technos » les plus chèrement valorisées baissent, les value prendront le relai… mais la détente des taux vient leur offrir un bol d’oxygène.

Avec les banques centrales, les feux passent à l’orange, jamais au rouge. Mais n’oubliez pas, un feu orange est un feu vert qui s’ignore !

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